Le 1er septembre 1803 un collège communal public (mais payant) ouvre à Charleville. Cette ouverture est permise par la loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) voulue par Napoléon Bonaparte, alors premier Consul, et qui réorganise l'enseignement public après l'épisode de la Révolution. En ce qui concerne l'enseignement secondaire sa principale mesure est la création des lycées, financés par l’État. Mais la loi ajoute aussi que les communes peuvent établir à leurs frais des "écoles secondaires où seront enseignées les langues latine et française, les premiers principes de la géographie, de l'histoire et des mathématiques". Par la suite, ces écoles secondaires vont prendre le nom de collèges communaux, puis de collèges tout court.
Dirigé par l’abbé Delvincourt, le collège communal de Charleville s’installe dans une partie des bâtiments d’un ancien couvent, le couvent du Saint Sépulcre. Il ne faut pas s'étonner de la présence d'un ecclésiastique à la tête de cet établissement car c'est seulement avec la IIIe République que les religieux ne pourront plus enseigner dans l'enseignement public, tant au niveau du primaire que du secondaire.
L'abbé Henri Delvincourt (1767-1826), tableau de Jean-Baptiste Couvelet (Musée de l'Ardenne).
En 16, le couvent des chanoinesses [en 4 le Vieux Moulin], plan de 1741 (Archives départementales des Ardennes).
En 1808, l’évêque de Metz qui a, depuis le Concordat, les Ardennes sous sa juridiction, autorise l’abbé Delvincourt à ouvrir dans le reste des bâtiments de l’ancien couvent un petit séminaire dont il cumule la direction avec celle du collège. Durant plusieurs décennies les collégiens vont cohabiter, non sans difficultés parfois, avec les séminaristes. Les effectifs du collège tournent autour de 150 à 250 élèves, en majorité des pensionnaires. Mais d’une année sur l’autre les effectifs fluctuent beaucoup, ce qui s’explique par les aléas de la situation financière des parents d’élèves, l’enseignement secondaire étant à l’époque payant.
Sous le Second-Empire, le collège voit sa réputation s'accroître et ses effectifs augmenter pour atteindre 400 élèves environ, dont certains venus de Belgique. En 1876, un incendie détruit une partie des bâtiments du collège mais heureusement sans faire de victime. La même année le collège municipal est enfin transformé en lycée, le premier et le seul des Ardennes à l'époque. Trois ans plus tard le lycée est transféré dans les anciens haras impériaux du Petit-Bois et, en 1893, il prend l’appellation de lycée Chanzy.
Le lycée Chanzy à la Belle Époque
en i : le lycée (qui ne s'appelle pas encore Chanzy), plan de 1879 (Archives départementales des Ardennes).
Le collège municipal possède à Charleville un concurrent redoutable, l’institution Rossat, du nom de celui qui l’a fondée au milieu du XIXe siècle, François Rossat.
Les bâtiments de l'Institution Saint-Remi, à la Belle Époque (Archives départementales des Ardennes).
Située au 11 de la rue de l'Arquebuse, il s'agit d'une institution privée et laïque d’enseignement secondaire qui comporte aussi une annexe primaire avec des classes de 9e, 8e et 7e. L’institution Rossat abrite quasiment le même effectif que le collège, avec là aussi un nombre très élevé de pensionnaires. Cependant, elle s’en distingue par une orientation plus moderne en donnant une place moins importante au latin et plus conséquente aux sciences. Du coup la partie la plus conservatrice de la bourgeoisie de Charleville qui veut pour ses enfants des études classiques les envoie au collège et ceux qui ont en vue pour leur progéniture une profession commerciale ou industrielle les envoient à l’institution Rossat. La rivalité entre les deux établissements secondaires est vive, allant parfois jusqu'à des bagarres rangées entre élèves. L’institution Rossat disparaît en 1886 et ses locaux sont repris par l’institution privée Saint-Remi, une filiale du collège privé Notre-Dame de Rethel.
Le jeune Arthur Rimbaud a successivement fréquenté les deux établissements. De 1861 à 1865 il est élève à l’institution Rossat où il suit les classes de la 9e à la 7e. Il y commence même sa 6e avant de la terminer au collège municipal où il fait le reste de ses études secondaires. C’est là, en 1870, alors qu’il est en classe de rhétorique, qu’il se lie d’amitié avec son professeur, Georges Izambart, celui qui aura une influence décisive sur sa carrière de poète.






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