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Le roi de France Henri 1er épouse Anne de Kiev à Reims

 

 

 

 

 

 

 

Le 19 mai 1051, dimanche de la Pentecôte, est célébré à Reims le mariage du roi de France Henri 1er et de la princesse Anne de Kiev.

 

Le mariage de Henri 1er et Anne de Kiev, enluminure extraite des Grandes Chroniques de France, écrites au XIVe siècle et conservées à la British Library

 

Henri, né vers 1008, est le deuxième fils du roi de France Robert le Pieux dont il devient l’héritier à la mort de son frère aîné Hugues, en 1025. Sacré à Reims le 14 mai 1027, il ne monte pourtant sur le trône qu’en juillet 1031 à la mort de son père.


Comme Henri a été marié une première fois à une princesse allemande, Mathilde de Frise, morte très jeune et qui ne lui a pas donné d’héritier, le mariage de 1051 est en fait un remariage pour un souverain qui a dépassé les 40 ans, âge de la vieillesse à l’époque. Quant à l’épouse, la princesse Anne de Kiev, elle a alors autour de 25 ans et elle est la fille du roi Jaroslav de Kiev et la petite-fille de Vladimir le Grand, le fondateur de la puissance russe. Leur mariage va durer jusqu’en 1060, année de la mort de Henri 1er. Le couple a cependant, durant ces neuf années, le temps d’avoir 4 enfants, 3 garçons et une fille morte en bas-âge. Comme l’aîné des garçons, le futur Philippe 1er, n’a que 8 ans à la mort de son père, une régence est mise en place à laquelle participe Anne de Kiev. La veuve de Henri 1er va épouser par la suite un grand féodal, le comte de Valois, mariage qui fait d’ailleurs scandale puisque le comte, pour pouvoir épouser Anne, répudie purement et simplement son épouse légitime, ce qui lui vaut  pendant quelques années d'être excommunié. A la mort du comte, Anne de Kiev se retire à l’abbaye de Senlis où elle meurt entre 1075 et 1089.


Cela dit, il ne faut pas accorder à ce mariage une importance qu’historiquement il n’a pas. Henri 1er en épousant une princesse de l’Europe de l’Est ne fait pas de la grande géopolitique européenne comme on pourrait le croire  aujourd’hui. Dans la réalité, il a déjà du mal à s’imposer dans son propre royaume où beaucoup de grands seigneurs sont plus puissants que lui et contestent son pouvoir. En fait, il épouse une  princesse de sang royal qui est, si l'on peut dire, disponible et qui, venant de l'autre bout de l'Europe, ne risque pas d'avoir un lien de consanguinité, même lointain, avec lui.D’ailleurs à l’époque le mariage n’a guère de retentissement et les textes n’évoquent pratiquement jamais Anne de Kiev.


En fait, c’est plusieurs siècles après que l’on s’est intéressé à l’évènement et pour des raisons qui n’ont rien à voir avec lui mais qui concernent la relation franco-russe du moment. Ainsi en a-t-il été lors de la visite de Pierre le Grand en France en 1717 ou de celle du Tsar Nicolas II en 1901. Quand l’un et l’autre sont passés à Reims il leur a été présenté le fameux évangéliaire slavon, conservé aujourd’hui à la Bibliothèque Carnegie, dont on racontait qu’Anne de Kiev aurait été à l’origine de sa présence à Reims. Cette légende est née en réalité au début du XIXe siècle quand des érudits russes ont émis l’hypothèse que le manuscrit aurait été donné par Anne de Kiev à l’évêque de Châlons-en-Champagne, Roger, qui était allé la chercher en Ukraine pour son mariage et qui aurait ensuite cédé le manuscrit à la cathédrale de Reims. Or, si le document est bien un exceptionnel manuscrit médiéval slave, il n’a rien à voir avec la princesse mais il a été offert, sans que l’on sache exactement comment il se l’était procuré, par le cardinal de Lorraine à la cathédrale de Reims en 1574. Cependant, cette légende de l’évangéliaire qui serait un cadeau d’Anne de Kiev est encore aujourd’hui largement répandue en Russie et en Ukraine.




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