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Le textile à Reims au Moyen-Age.

 

 

 

 


Vente de vêtements en draps de laine au XVe siècle. Le maître couturier travaille sur mesure, essentiellement pour les riches. Les essayages se déroulent dans la boutique ou dans la rue, avec l’aide des apprentis. Quant aux pauvres ils doivent se contenter des vêtements usagés vendus par les fripiers, très nombreux au Moyen-Age (Gallica-BNF).

 

Au Moyen-Age, le textile est l’activité de Reims qui occupe le plus de monde. Plusieurs types d’étoffes sont fabriqués. Il y a d’abord la serge, un tissu de laine qui sert notamment à confectionner des rideaux comme le mentionne un compte de l’argenterie royale de 1316 qui note l’acquisition de six serges vertes de Reims pour mettre aux fenêtres de la chambre du roi. Il y a aussi l’étamine, une étoffe légère de laine ou de soie, voire d'un mélange des deux. Mais le produit qui possède la plus grande renommée est la toile de Reims qui est un tissu de lin, fin et délicat, dont on fait des draps de lit, des serviettes, mais aussi des chemises et des doublets, c’est à dire des vêtements de dessous. Les toiles de Reims sont considérées comme des étoffes précieuses et figurent dans la garde-robe des puissants. Un inventaire de 1420 du duc de Bourgogne Philippe le Bon mentionne une grande toile de Reims frangée de soie et bordée d’or, qui est destinée à servir de drap de lit. Ces toiles sont aussi exportées vers l’Italie, l’Espagne ou l’Angleterre où elles sont très appréciées des femmes de la noblesse et de la haute bourgeoisie.

 

Couturières découpant un rouleau de tissu de lin. En bas à droite deux jeunes apprenties s'initient à la couture (Gallica-BNF).


Comme toujours au Moyen-Age, les artisans qui fabriquent ces tissus ne peuvent pas le faire librement. Ils doivent se faire admettre dans des corporations organisées de manière hiérarchique avec, au sommet, des maîtres qui ont sous leurs ordres des compagnons et des apprentis. Cela dit, à Reims, l’accès à la corporation des drapiers est assez facile. Il n’y a pas de droit d’accès à payer et il suffit de prêter serment devant les maîtres du métier de faire "des draps bons et loyaux". La fabrication des étoffes est réglée de manière précise. Il est interdit en particulier de tricher en utilisant des bourres de laine ou en confectionnant des rouleaux de drap conformes sur les parties facilement visibles, comme les bordures, mais de mauvaise qualité dans celles qui le sont moins, comme l'intérieur. Ceux qui contreviennent à ces  règles risquent de lourdes amendes. Les deux-tiers du produit de ces dernières vont au seigneur qui possède le droit de ban, en l’occurrence à Reims l’archevêque, et le tiers restant va à la corporation.


Si des artisans drapiers semblent être installés dans toutes les paroisses de la ville, ceux qui fabriquent les toiles se concentrent plutôt dans la paroisse Saint Denis qui correspond au centre-ville actuel. En témoigne la rue encore appelée rue des Telliers, c’est à dire des toiliers en ancien français. 

 

Extrait d'un plan de 1845 (Bibliothèque municipale de Reims).

 

Les artisans drapiers qui fabriquent les étoffes ont généralement des revenus modestes et font partie des "menus" comme on dit au Moyen-Age. Par contre les marchands qui leur achètent leurs produits pour en faire le commerce sont, eux, beaucoup plus riches et puissants. Ils font partie des "gros", c'est à dire des plus aisés des Rémois.


Cependant, les difficultés de la fin du Moyen-Age, la peste noire, la guerre de Cent ans et la crise économique, vont fortement affaiblir le textile rémois.

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