Le Synode de Reims d'août 923

 

 

 

 

 

 

 

 

Le 29 août 923 l’archevêque de Reims Séulf réunit à Reims un synode qui décide une pénitence générale pour tous ceux qui ont pris part à la bataille de Soissons le 15 juin précédent. 

 

 

bataille de Soissons, 15 juin 923 (patrimoine numérisé de la Ville de Besançon)


Au début du Xe siècle la région de Reims appartient à la Francie occidentale dont le souverain est le carolingien Charles le Simple. Mais si ce dernier porte le titre de roi, dans la réalité il est beaucoup plus faible que beaucoup de grands seigneurs de son royaume qui n’hésitent pas à contester son pouvoir. En juin 922 un certain nombre d’entre eux décident même d’élire comme roi le comte de Paris, Robert, sous le nom de Robert 1er. Ils forment ce que l’on appelle les Robertiens. Cependant Charles le Simple, qui n’entend pas être dépossédé, lève des troupes et affronte militairement Robert 1er dans une bataille qui se déroule devant la ville de Soissons le dimanche 15 juin 923. Mais Charles le Simple perd le combat et il est fait prisonnier par un allié de Robert, le comte Herbert de Vermandois qui enferme le carolingien dans la forteresse de Péronne où il meurt en 629, après 6 ans de captivité. Cependant lors du combat du 15 juin Robert 1er a été tué et c’est son beau-frère, Raoul, duc de Bourgogne qui est alors désigné par les grands seigneurs pour le remplacer comme roi.

A l’époque, l’Église de Reims occupe une place stratégique, à la fois religieuse et politique. Sur le plan religieux l’archevêque de Reims est à la tête d’une vaste province ecclésiastique qui comprend, outre le diocèse de Reims, ceux de Châlons, de Senlis, de Noyon, d’Amiens, de Cambrai, d’Arras, de Tournai et de Thérouanne. A l’Église de Reims s’attache aussi le souvenir du baptême de Clovis par Saint Remi même si à ce moment elle n’a pas encore le monopole du sacre des rois qu’elle aura plus tard. Mais le siège archiépiscopal de Reims est aussi au cœur du pouvoir politique. Les archevêques de Reims sont longtemps très proches de la dynastie carolingienne. Hincmar a été le principal conseiller politique de Charles le Chauve. Son successeur, Foulque, a été le chancelier de Charles le simple. Avec le successeur de Foulque, Hervé, les choses se compliquent. Il soutient d’abord Charles le Simple mais en 922 il se rallie à Robert 1er et autorisant que de dernier soit sacré, par l’archevêque de Sens, le dimanche 30 juin 922 à Saint Remi de Reims. Hervé meurt quelques jours plus tard et son successeur, Séulf, prend lui aussi le parti de Robert 1er.

Séulf réunit fin août à Reims un synode qui regroupe tous les évêques de sa province ecclésiastique. A son issue une pénitence est imposée à tous ceux qui ont participé au combat de Soissons et cela quel que soit leur camp. Ils devront jeûner tous les vendredis. Pendant le Carême, en plus du vendredi, le jeune leur est imposé aussi les lundis et mercredis. Des périodes de quinze jours de jeûne sont en outre prévues avant la Saint-Jean et avant Noël. Enfin, pour faire bonne mesure, tout cela doit durer trois années consécutives. Cette pénitence apparaît largement démesurée par rapport à ce qui se pratiquait d’ordinaire même si, probablement, beaucoup de pénitents n’ont pas dû l’appliquer à la lettre !

La dureté de la pénitence s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, le combat ayant eu lieu un dimanche, le sang a été versé le jour du Seigneur. Mais il y a aussi, étant donné les mentalités de l’époque, un doute sur la légitimité de la victoire car Dieu ne semble pas avoir montré un soutien clair à l’un des deux camps camp. En effet Dieu ne peut être du côté de Charles le simple puisque ce dernier a perdu mais la mort de Robert peut être vue comme une punition divine de sa rébellion.

Cependant, le diocèse de Reims est convoité par le comte Herbert de Vermandois qui, allié au départ des Robertiens, a en fait des ambitions considérables pour lui-même et sa famille. En 925, à la mort de Séulf, qu’il a peut-être fait empoisonner, il fait élire comme archevêque de Reims son fils Hugues, alors âgé de 5 ans ! Il faut rappeler que, canoniquement, l’évêque est élu à l’époque « par le clergé et par le peuple  mais dans la réalité c’est par une étroite élite du clergé et par les nobles les plus puissants. Celui qui est en position de force oriente l’élection, voire désigne purement et simplement qui sera évêque. Il est vrai que, là, l’élection d’un enfant aussi jeune a eu tout de même du mal à passer et a plongé l’Église de Reims dans une crise qui ne prend fin qu’en 848.