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Les sœurs clarisses de Reims



Les clarisses sont les religieuses de l’ordre des Pauvres Dames, fondé au début du XIIIe siècle à Assise en Italie par Sainte Claire, une disciple de Saint François. C'est à Reims, vers 1220, que l’ordre établit sa première communauté hors d'Italie en y envoyant plusieurs sœurs italiennes, conduites par Marie de Braye. Cette dernière, issue d’une famille noble de Gênes (de Braye étant la version francisée d’un nom italien qui nous est resté inconnu), en devient la première abbesse.

A Reims, les religieuses sont accueillies par l'archevêque de Reims, Guillaume de Joinville qui les installe sur un terrain appartenant à l’abbaye de Saint-Denis et situé à l’intersection des actuelles rue du Jard et Gambetta (là où est aujourd'hui le Conservatoire régional de musique).

 


 

Le couvent et l'église des clarisses au milieu du XVIIIe siècle (Bibliothèque Carnegie).  

Le nouveau monastère fait rapidement partie du paysage religieux de Reims. Si les clarisses rémoises suivent la règle de Sainte Claire qui exige une pauvreté absolue et une vie consacrée à la contemplation, au fil du temps la communauté va bénéficier de donations venant de Rémois fortunés soucieux de leur salut. En 1289, à l’occasion du sacre de Philippe IV le Bel, le monastère est imposé d’une somme de 9 livres pour les huit maisons qu’il possède à Reims. Cette propriété patrimoniale amène les clarisses rémoises, au début du XVIe siècle, à adopter la règle urbaniste, moins sévère en ce qui concerne les règles de vie et plus souple financièrement puisqu’elle stipule que, tout en demeurant pauvres en tant qu'individus, elles peuvent posséder des biens au titre de la communauté. Les abbesses du monastère de Reims, élues par la communauté, appartiennent souvent à de grandes familles rémoises comme par exemple, au XVIIe siècle, Claire et Agnès Colbert, les propres sœurs du ministre de Louis XIV. Cependant, au XVIIIe siècle les clarisses, comme d'ailleurs tous les ordres réguliers, sont en déclin et, à la veille de la Révolution, le couvent n’abrite plus qu’une trentaine de religieuses dont la majorité a plus de 50 ans.

Les bouleversements révolutionnaires mettent provisoirement fin à la présence des clarisses à Reims. Les ordres religieux ayant été supprimés à l’automne 1792, les clarisses rémoises doivent quitter leur couvent et retourner à la vie laïque. Les bâtiments conventuels sont, quant à eux, transformés en filature avant d’être démolis en 1800.


C’est seulement 140 ans plus tard, en 1933, que les clarisses font leur retour à Reims, plus précisément à Tinqueux dans un ancien couvent capucin.

 

 Le couvent de Tinqueux en 1935 (source L'Union).

 

Ce retour est dû à deux femmes. La première est une laïque, la comtesse de Lavalette, qui joue de son influence, notamment auprès de Monseigneur Suhard, alors archevêque de Reims. La seconde est l'abbesse des clarisses de Nantes, sœur Marie du Sacré-Cœur, qui envoie à Reims plusieurs de ses religieuses. la communauté de Reims dépend de Nantes jusqu'en 1958, date à laquelle le couvent de Reims devient totalement autonome en élisant sa propre abbesse.

Mais, le nombre de religieuses diminuant, les bâtiments de Tinqueux n’apparaissent plus adaptés, d'autant plus qu'ils sont très coûteux à entretenir. Décision est alors prise, en 1997, de déménager le monastère à Cormontreuil où la communauté, qui compte environ 25 religieuses, s’installe en 2000 dans des bâtiments plus modestes mais neufs.

 

 L'actuel monastère de Reims-Cormontreuil (site des clarisses de Reims).



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