Au départ on a l’église que le Maître des milices et consul, Jovin, fait édifier dans le faubourg Saint-Remi vers 370 pour recevoir sa sépulture.
Par la suite, cette église prend le nom de Saint-Agricole et après qu'on y ait inhumé en 407 l’évêque Nicaise, martyrisé par les Vandales, celui de Saint-Nicaise. En 1066 l'archevêque Gervais y installe une communauté de moines bénédictins pour l’entretenir et accueillir les pèlerins venus se recueillir sur la tombe du saint. Les débuts de l'abbaye sont assez difficiles mais elle connaît ensuite un fort développement et au XIIIe siècle, elle se trouve à son apogée. Cependant sa puissance est bien moindre que celle de sa voisine et rivale, l’abbaye Saint-Remi, bénédictine elle aussi.
A son apogée, Saint-Nicaise ne compte au maximum qu’une cinquantaine de moines, alors que Saint-Remi en abrite quatre fois plus. Saint-Nicaise est aussi une puissance seigneuriale puisqu’elle est à la tête d’un ban, c’est à dire d’un territoire sur lequel elle exerce l’autorité judiciaire et fiscale, mais ce ban se réduit aux quelques maisons qui entourent l’abbaye, bien loin derrière le ban de Saint-Remi et surtout le ban de l’archevêque qui, lui, concerne presque les deux-tiers de Reims.
Cependant, les bénédictins de Saint-Nicaise, grâce à leur gestion avisée, réussissent à financer, pour remplacer leur vieille église décrépite, la construction d'une splendide église abbatiale. Commencée en 1231, elle est considérée comme l'un des chefs-d'œuvre de l'architecture gothique flamboyante et souvent comparée à la Sainte-Chapelle de Paris. Ses architectes sont d'abord Hugues Libergier qui y travaille jusqu'à sa mort en 1263, puis, à partir de cette date, Robert de Coucy, l'un des architectes de la cathédrale.
Malheureusement, à partir du XVIe siècle, l’abbaye Saint-Nicaise va connaître un déclin continu. En 1643, les revenus et tous les droits de l'abbaye sont mis en commende de la Sainte-Chapelle de Paris, ce qui fait qu'elle n'a plus d’abbé en propre. A la veille de la Révolution, l’abbaye abrite seulement une quinzaine de religieux.
En 1791 les congrégations religieuses sont supprimées et leurs possessions vendues comme biens nationaux. Encore une fois la rivalité avec Saint Remi se manifeste mais cette fois elle est fatale à Saint-Nicaise. En effet, en 1791, on décide, pour des raisons financières, qu’un seul des deux bâtiments serait conservé et c’est Saint-Remi qui est choisi. Quelques années plus tard, sous le Directoire, le gouvernement vend Saint-Nicaise pour deux millions de francs. L’acheteur, un entrepreneur parisien, la transforme en carrière de pierres et la destruction de l’Abbaye est achevée en 1819.
dessins de Pierre Ledu, montrant l'état de l'église abbatiale vers 1803 (Musées de Reims).
Aujourd’hui l’emplacement même de l’abbaye est
propriété de la maison de champagne Taittinger. On
peut y voir un retour aux sources puisque,
du temps de sa prospérité,
Saint-Nicaise s’était
toujours intéressée à la vigne et au vin. Elle possédait de
nombreuses pièces
de vigne au flanc de la montagne de Reims. Mais comme le vin produit
à l’époque se conservait
mal, les moines, pour améliorer les choses
avaient aménagé en caves les crayères creusées pour en extraire la pierre nécessaire à la construction de l'abbaye.
Le "pilier tremblant" de Saint-Nicaise
Il s'agissait en fait d'un un arc-boutant côté sud qui
oscillait à chaque fois que l’on mettait en branle une cloche précise. De nombreux savants, mais aussi des personnalités célèbres, sont venus contempler le phénomène et parmi eux, en 1717, le Tsar Pierre le Grand. Ce n'est que par la suite que l'on a pu expliquer le mouvement du pilier, et cela quand on s'est aperçu de l'absence de crochets de fer et de plomb pour le scellement entre les pierres des trois premiers arcs-boutants. On y remédia et le phénomène ne se reproduisit plus.
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