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dimanche 21 septembre 1923, inauguration du Tennis Club de Reims.

 


Le jeu de courte paume, estampe de 1612 (Gallica-BNF).

Le tennis tire son origine d'un jeu français né au  Moyen-Age, le jeu de longue paume. Ce jeu est pratiqué en extérieur par plusieurs joueurs, séparés par une corde, qui se renvoient une balle en cuir rembourrée de son à l’aide de la paume de la main. A la Renaissance  apparaît le jeu de courte paume qui, lui, se déroule en salle et pour lequel sont utilisées des raquettes, la corde étant en outre remplacée par un filet. Ce jeu de courte paume fait fureur dans la France d'Ancien Régime puis décline. Par contre en Angleterre, où le jeu de courte paume avait été importé de France, il continue d’avoir du succès. Mais dans la seconde moitié du XIXe siècle, les Anglais vont fixer de nouvelles règles et utiliser une balle en caoutchouc qui rebondit bien mieux que l’ancienne balle en cuir. Pour donner un nom au nouveau sport, ils anglicisent en "tennis" le mot français "tenez" que les joueurs du jeu de courte paume avaient coutume de prononcer lors de l’engagement. Le succès du tennis auprès de la bonne société britannique est immédiat, lui donnant sa réputation de sport aristocratique. Très vite, passant la Manche, le tennis se répand dans les élites françaises.

Le tennis apparaît très tôt à Reims puisqu’un premier club de tennis est créé en 1903 au parc de la Haubette. Des courts de tennis sont aussi installés dans le parc des sports de la Maison de champagne Pommery que le marquis Melchior de Polignac fait édifier à partir de 1909. Mais toutes ces installations sont détruites par les bombardements de la Première Guerre mondiale.

Avec la reconstruction de la ville un nouveau club de tennis voit le jour, le Tennis Club dont les statuts sont déposés le 11 juin 1920. On y retrouve la famille de Polignac puisque le Comité fondateur a, comme président d’honneur, Melchior de Polignac et, comme président actif, son cousin Maxence de Polignac. Il y a aussi deux autres présidentes d’honneur : Mmes Anne Morgan et Anne Murray-Dike. Leur présence s’explique par leur appartenance au Comité américain pour les Régions dévastées qui a donné 250 000 francs au nouveau club de tennis. 

 

Anne Morgan (1873-1952) et Anne Murray-Dike (1878-1929), (Musée Franco-Américain de Blérancourt).
 

Le reste du financement est apporté par une trentaine de donateurs qui appartiennent à l’élite rémoise. On y retrouve des propriétaires de maisons de champagne comme les de Polignac, déjà cités, ou les Heidsieck, des industriels comme Emile Charbonneaux, dirigeant de la verrerie éponyme, des dirigeants succursalistes comme Edouard Mignot des Comptoirs Français mais aussi d’autres notables rémois comme le notaire André Thiénot.

La société du Tennis Club achète pour 200 000 francs le terrain d'une famille rémoise, les Luzzani. Ce terrain est situé près de l’actuel lycée Clemenceau, entre la rue des Coutures, la rue Lagrive et le boulevard Gerbert (rebaptisé boulevard Pasteur en 1924). Il faut d’abord le remettre en état car il a été bombardé à plusieurs reprises. Puis un permis de construire est déposé avec un plan d’ensemble élaboré par l’architecte Édouard Redont, celui là même qui avait conçu le parc Pommery.


Les travaux commencent en 1921-1922. Le premier bâtiment construit par Redont est le hall composé de deux courts de tennis couverts avec un plancher de jeu en bois.

 

Le hall en construction, 1922 (Musée Franco-Américain de Blérancourt).

Puis vient le Club-house, un bâtiment de style normand à pans de bois, le régionalisme étant très en vogue à l'époque. A l’intérieur on y trouve une salle de bridge, un fumoir et une salle de billard. La décoration est Art Déco. Enfin, quatre courts de tennis non couverts sont aussi édifiés.


 


(Archives municipales de Reims et Musée Franco-Américain de Blérancourt)

 

 

 

 



 

Une piscine, non prévue au départ, est construite et inaugurée en septembre 1923. En béton armé, elle est l’œuvre de l’architecte Jacques Rapin et elle est décorée par le frère de ce dernier, Henri, là aussi dans le style Art Déco avec un décor de mosaïque bleu et or, le béton autour du bassin étant, lui, teint en rouge en souvenir de l’Antiquité romaine. C’est une piscine réglementaire pour le Water-polo et qui dispose de deux plongeoirs, l’un de 4 mètres et l’autre de 7 mètres, ce dernier ayant été depuis démonté.  

La piscine peu après son inauguration (coll.part).

 

Tout l’ensemble reflète bien l’hygiénisme en vogue à l’époque mais le Tennis Club est aussi un lieu où aime se retrouver la bonne société rémoise. On y pratique des activités sportives mais on y donne aussi des réceptions.

 

 
Déjeuner et spectacle nautique du 20 juin 1926, à l’occasion du Rallye Champagne aérien (L'Illustration, numéro du 3 juillet 1926).


Dans les années 1950, le bâtiment des courts couverts, en très mauvais état, est démoli et remplacé par un hall en béton armé qui abrite de nouveaux courts couverts, lesquels reçoivent le nom d’un sociétaire du club de tennis rémois, André Schneiter, fusillé par les Allemands en août 1944 pour faits de Résistance. 

 

 

 (coll.part).

Plus récemment, en 2006, trois nouveaux courts couverts ont été édifiés.




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